Paris Foot Gay: «Nous ne pouvons jouer contre vous pour une question de principes» Les dirigeants du Paris Foot Gay ont demandé à leur ligue de prendre des sanctions à l’encontre du Créteil Bébel, après le refus de ce club de «musulmans pratiquants» de jouer un match dimanche contre le PFG.
Ce sont des mots et des actes auxquels on ne prête guère attention tant ils deviennent courants au bord des terrains de football. Des insultes ou préjugés homophobes autant dans le football professionnel qu’amateur.
Dimanche, les joueurs du Paris Foot Gay ont été contraints de laisser crampons et maillots dans le sac. L’équipe adverse, le Créteil Bébel, qu’ils devaient rencontrer pour un match de Coupe Foot Loisir a refusé la veille de disputer la partie pour une raison de «principes». Des «principes» exprimés via un simple mail.
«Désolé, mais par rapport au nom de votre équipe et conformément aux principes de notre équipe, qui est une équipe de musulmans pratiquants, nous ne pouvons jouer contre vous, nos convictions sont de loin plus importantes qu’un simple match de foot, encore une fois excusez-nous de vous avoir prévenus si tard».
Le ton est cordial. Pris dans le contexte, il en devient froid et glacial. «C’est violent. C’est d’autant plus choquant que ce n’est pas haineux», explique Pascal Brethes, président et cofondateur de l’association Paris Foot Gay. Depuis sa création en 2003, l’équipe, composée d’hétéros et d’homos, n’a pas connu tel paroxysme. «L’équipe peut être de temps en temps la cible d’actes isolés, d’injures verbales. Mais c’est la première fois que l’on se heurte à un refus. Le Paris Foot Gay n’est pas un club communautariste, c’est d’abord une association qui lutte contre l’homophobie dans le football».
«Le nom Paris Foot Gay provoque un peu, mais ce n’est pas une raison»
«On sent parfois des réticences, que notre projet n’est pas apprécié. Le nom Paris Foot Gay, certes ça provoque un peu, mais ce n’est pas une raison», estime pour sa part Brahim Naït-Balk, entraîneur de l’équipe qui est rattachée à un championnat parallèle à ceux de la Fédération Française de Football. Brahim Naït-Balk est musulman. Dans l’équipe qui l’entraîne se côtoient musulmans, juifs et catholiques. Pour lui, l’argument religieux pour expliquer le refus de jouer contre des homos ne tient pas. «La religion est détournée par les hommes pour aller dans le sens qui les arrange.»
Cet incident témoigne en tout cas d’une banalisation de l’homophobie dans le football. «Dans les stades de clubs professionnels on entend régulièrement des injures homophobes. C’est devenu l’insulte suprême. Quand un jeune enfant qui peut se chercher encore entend son père hurler « sale pédé », c’est destructeur…», commente Pascal Brethes. Même constat de l’entraîneur : «On n’ose pas se lancer dans le championnat officiel de la FFF. On sait que là, on nous attend au tournant pour « casser du PD »…»
Depuis quelques années, le PFG est parrainé par son grand frère, le Paris-Saint-Germain. Une charte contre l’homophobie a été signée par quatre autres clubs pro (Auxerre, Saint-Etienne, Nice, Monaco). C’est encore peu. Les mentalités sont dures à changer, les lignes compliquées à bouger. «Il faudrait déjà que les dirigeants des grands clubs montrent l’exemple», poursuit Pascal Brethes qui fait notamment référence ici à l’attitude de l’emblématique président de Montpellier Loulou Nicollin, dont le franc-parler lui vaut certains débordements.
Selon le président de l’association Paris Foot Gay, le football serait gangrené par une sorte «d’omerta» qui règnerait en filigrane dans cet univers où l’on porte la virilité au rang de valeur supérieure. L’homosexualité dans le football, moins on en parle mieux c’est. «On part du principe que les homos ne font pas de foot, explique Pascal Brethes. Imaginez un coming out d’un footballeur professionnel, ce serait un suicide.» On se rappelle le cas de ce joueur anglais Justin Fashanu qui après avoir révélé son homosexualité a été la cible des quolibets et tacles de ses partenaires, et pris en grippe par le public. Poursuivi pour agression sexuelle sur mineur, il s’était donné la mort en 1998.
«Donner la priorité au dialogue»
Mardi, les dirigeants du Paris Foot Gay ont demandé à leur ligue, la Commission Football Loisirs, de prendre des sanctions à l’encontre du Créteil Bébel. Contacté par Libération.fr, Jacques Stouvenel, président de la commission football Loisir, dénonce l’attitude des dirigeants du club cristollien. «J’ai été informé de cette histoire dimanche soir. Notre commission a pour objectif d’organiser des matchs de foot entre toutes les équipes, sans distinction de religion ou de couleur», explique-t-il.
Le comité directeur de la commission statuera sur cette affaire le 13 octobre prochain. «Je suis pour l’application des règlements. On peut donc aller de l’avertissement à l’exclusion», explique Jacques Stouvenel, qui qualifie, «à titre personnel», l’attitude du Créteil Bébel d’«inacceptable». Lors du vote au comité directeur, tous les clubs seront présents, y compris le Créteil Bébel, qui pourra s’expliquer sur sa décision.
Brahim Naït-Balk souhaite pour sa part «donner la priorité au dialogue» afin de pouvoir éventuellement rejouer le match. Mais pour ça, il faut que l’équipe de Créteil Bébel change de discours. Interrogé mardi sur France Bleu, un dirigeant du Créteil Bébel a confirmé la position du club, déclarant «en tant que musulman, j’ai quand même le droit de ne pas vouloir jouer (contre le PFG) parce que je n’adhère pas à leurs idées», tout en s’excusant «si quelqu’un s’est senti vexé ou blessé». Mais si le club cristollien campe sur ses déclarations, le Paris Foot Gay, qui a reçu le soutien de la mairie de Paris, de la FFF ou encore de SOS Racisme, n’exclut pas de porter plainte. source
RIEN DE CHOQUANT POUR MA PART, J’AI PAS FORCEMENT ENVIE DE JOUER CONTRE DES HOMOSEXUELS MOI AUSSI.